Les micronations africaines, bien que souvent méconnues, offrent un regard fascinant sur la diversité culturelle et les aspirations que l'on rencontre sur le continent. Cet article explorera quelques-unes de ces micronations et comment elles répondent aux défis d'aujourd'hui.
Parmi elles, l'Empire de Guanduania se distingue par sa localisation au Mozambique, en Afrique australe et lusophone, et par sa philosophie axée sur la justice, la liberté, et l'égalité.
Fondé en 2017, l'Empire de Guanduania se présente comme une micro-nation engagée dans la promotion des valeurs universelles. Guanduania adopte une vision holistique qui se résume dans sa devise : "Une race, une famille, une planète, un univers."
Sur ces bases humanistes, Guanduania est une des micronations les plus avancées dans la progression vers l'auto-suffisance alimentaire. En effet, l'agriculture tient une place centrale dans son économie avec la culture de fruits et légumes à laquelle s'ajoute l'élevage de volailles. Ces résultats en la matière démontrent que l'auto-suffisance alimentaire est possible pour les communautés micronationales évoluant en milieu rural. L'intention du Guanduania est d'autant plus salutaire car elle obtient de bons résultats en se focalisant sur des besoins alimentaires réels et non sur des aspirations purement mercantiles.
L'Empire de Guanduania, par ses valeurs universelles, offre un exemple intéressant de micronation africaine. En explorant ses principes, ses initiatives concrètes et sa connexion unique avec l'agriculture, nous gagnons une perspective plus approfondie sur la diversité des aspirations micronationales en Afrique. Ses projets nous enseignent des leçons précieuses sur la recherche de solutions alternatives, la souveraineté locale et les défis uniques auxquels sont confrontées les petites communautés.
Quittons l'Afrique australe pour rejoindre la partie occidentale et francophone du continent en Côte d'Ivoire plus précisément où un véritable printemps micronational s'opère. Depuis le 28 février 2016, la République de Toubak a vu le jour avec des jeunes passionnés de politique. La micronation a eu pour premier objet d'être une simulation d'état dans laquelle ils pouvaient concevoir et débattre. Toubak a rapidement évolué pour devenir une micronation comptant aujourd'hui 439 habitants.
Là aussi, on retrouve un vrai sens existentiel car cette micronation n'hésite pas à prendre des positions et ouvrir des débats de société dans un pays encore retissant à certaines évolutions comme, par exemple, celle des droits LGBTQ+.
Dans l'exemple de Toubak, on observe ainsi une forme de micronationalisme pédagogique qui ouvre les discussions sur des sujets encore jugés taboos par les institutions étatiques. On assiste bel est bien à un micronationalisme qui devient acteur dans l'évolution d'une société.
La République de Toubak n'est pas la seule micronation située en Côte d'Ivoire. L'État de Nova-Troie composé d'une fédération de micronations ivoiriennes et françaises agit elle aussi depuis plusieurs années. Les deux micronations entretiennent des liens très étroits et s'entraident mutuellement. Nova-Troie a été la première a rejoindre la Microfrancophonie et Toubak a déposé son dossier de candidature à l'entrée dans cette organisation.
Nous avons vu que le micronationalisme en Afrique épouse des causes utiles qui lui donne un sens dans les domaines de l'auto-suffisance alimentaire et des débats de société. Mais ce n'est pas tout car un autre exemple pourrait bien faire figure de colonialisme.
Bir Tawil, le pays des Souverains venus d'ailleurs pour "faire le bien".
Sa fille de sept ans voulait être une princesse et c’est en théorie chose faite. Jeremiah Heaton, qui vit dans la campagne de Virginie, s’est rendu à la frontière de l’Egypte et du Soudan où une parcelle de terrain, le Bir Tawil, n’est officiellement sous l’égide d’aucun pays. Elle n’a aucun gouvernement, aucune ville et aucun habitant permanent. Après avoir planté son drapeau, il a donc déclaré sa fille Emily, princesse du « Royaume du Soudan du Nord ».
Dans son élan, le conquérant Heaton défendait son initiative avec de bonnes intentions : « On va aider les enfants d’Afrique qui n’ont rien à manger. On va faire un jardin qui sera aussi grand que notre territoire. ».
Les faits remontent à 2014 et depuis, pas un seul pissenlit n'a poussé du Bir Tawil, les nomades locaux ne sont pas morts de faim et vivent toujours en connaissance du terrain et des ressources dont ils disposent.
Quant à notre Princesse Emily, elle a bien grandi bien sûr. Aujourd'hui, il n'est pas sûr que la jeune fille choisirait le désert brûlant du Bir Tawil si on lui demandait de choisir entre cette destination ou faire un Spring break avec ses copines à Cancùn.
Si les bédouins nomades du Bir Tawil pensaient en avoir terminé avec cette monarchie reposant sur le pseudo-droit du planté de drapeau, et bien ils se trompaient. Un an plus tard, c'est au tour d' Amir Haiyawi, vivant en Belgique, de se poser sur la tête une couronne de Roi du Birland. Sur son site, on apprend que son titre de Roi lui a été conféré par le Roi Denis Okafor, de l'ancien royaume du Ezeigbo Ohanaeze, quelque part au centre du Ghana.
Là encore, le Roi du Birland est devenu le Souverain de nos braves bédouins du Bir Tawil pour des raisons altruistes, son coeur "ayant été brisé par le fait que ces derniers ne pouvaient avoir d'extraits de naissance, d'accès à l'eau courante, ni à l'éducation."
Que l'on trouve cette légitimité valable ou pas, il n'empêche que "l'État du Birland" bénéficie d'un véritable réseau de citoyens dans plusieurs pays, ce qui est loin d'être le cas d'Emily, Princesse du "Royaume du Soudan du Nord". Quant aux bédouins du Bir Tawil, ce "game of throne" entre micro-colonialistes semble bien loin de leur préoccupation.
L'Afrique regorge de cultures différentes qui perdurent depuis des millénaires. Le micronationalisme n'a pas pour vocation de prendre en otage une population ni de parler en son nom sans son accord, comme cela est le cas pour Seborga, Christiania, Uzûpis ou Aigues-Mortes.
Il est donc important de faire la différence entre des micronations fondées sur des valeurs comme le Guanduania, Toubak et Nova-Troie, qui donne au continent Africain, un printemps micronational prometteur et remarquable.
Le cas du Bir Tawil ne peut y être associer car il s'agit d'initiative individuelle de personnes s'étant auto-proclamées Souverains d'un peuple nomade et séculaire qui ne leur ont rien demandé. C'est peut-être là l'exemple d'une ligne rouge que le micronationalisme ne devrait jamais franchir.
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